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La charge de la preuve (the burden of proof)
Avoir la charge de la preuve est être en situation rationnelle de devoir fournir une preuve de vos affirmations (is to be rationally required to produce evidence for your assertion claims)
La charge de la preuve a plusieurs degrés.
Avoir une charge de la preuve plus lourde que l’opposant est devoir rationnellement produire davantage ou de meilleures preuves pour vos affirmations que votre adversaire pour les siennes.
De ce point de vue, l’attribution de la charge de la preuve - qui l’a et quelle poids a-t-elle - a des implications qui concerne ce que l’on fait en tant que penseurs logiques et critiques.
Si nous avons cette charge, nous devons en faire plus, produire davantage de raisons, ou des raisons plus solides. Si l’on ne l’a pas, il semble que nous en ayons moins à faire.
Voici un résumé de Dare et Kingsbury “mettre la charge de la preuve à sa place : à quel moment les différences dans l’allocation sont légitimes” (* ‘Putting the Burden of Proof in Its Place: When Are Differential Allocations Legitimate’ (2008) 26 Southern Journal of Philosophy 503-518.)*)
Vous n’avez pas besoin de lire la version complête de cet article pour ce cours : ce résumé suffira. La version complête de cet article est toutefois aussi fournie, dans le cas où vous souhaiteriez explorer plus en détail les questions soulevées ou clarifier certains point du résumé.
La charge de la preuve
L’exemple juridique : des personnes accusées d’un crime sont présumées innocentes. La charge de la preuve est à l’accusateur. Les accusés n’ont rien à prouver. Si les accusateurs n’arrive pas à satisfaire la charge, la présomption que l’accusé est innocent prédomine : innocent jusqu’à prouvé coupable.
L’opinion commune (the common view)
Il est rare, en dehors du cadre légal ou quasi-légal, que la charge de la preuve existe formellement. Toutefois, l’idée implicite… se trouve dans tout raisonnement. On aura davantage à fournir pour prouver quelque chose, et, si l’on échoue, la position alternative restera la préférée.
It is rare, outside legal and quasi-legal contexts, for the burden of proof on one side of an argument to be recognised formally. Yet, the implicit idea … is found in all reasoning. One person has a more demanding job of proving a point and, if they fail, then an alternative position remains the preferred one.
Matthew Allen, Smart Thinking 2004, p. 81.
l’opinion commune et notre opinion (The Common View and Our View)
L’opinion commune est que si la charge de la preuve incombe à votre opposant, vous pouvez vous permettre d’attendre gentiment qu’on vous montre que vous avez tord, plutôt que de vous soucier de fournir des arguments pour défendre votre position.
Notre point de vue est que cette opinion est erronée. Il n’est que très rarement acceptable de répartir la charge de la preuve de manière non équitable, ou de dire que quelqu’un a gagné juste parce que l’opposant n’a pas pu satisfaire la charge de la preuve. Il est presque toujours vrai que les deux parties ont une charge de la preuve égale, et donc une responsabilité égale à produire des arguments concernant leur opinion.
(*According to the common view: If the burden of proof (BOP) is on your opponent, you are entitled to sit back and wait for your claim to be disproved rather than having to provide positive arguments for it.
According to us: The common view is mistaken. It is only rarely OK to allocate the BOP unequally, or to say one position wins just because its opponents couldn’t meet the BOP. It’s almost always true that both sides to a dispute have an equal BOP, and so an equal responsibility to produce arguments for their views.*)
De manière plus détaillée, nous pensons que :
- Que l’inagalité de la charge de la preuve soit OK ou non dépend de ce que l’on cherche à faire en particulier, et de si cette inégalité participe ou non a atteindre ce but. (Whether unequal allocations of the BOP are OK or not depends on the aim of the particular inquiry, and on whether or not an unequal allocation helps achieve that aim.)
- De manière générale, on distingue les demandes visant à trouver la vérité et celles qui ne visent pas cela. (Most generally, we distinguish between inquiries aimed at finding the truth and inquiries that are not.)
- Nous pensons qu’une allocation inégale est bien sûr acceptable lorsque l’établissement de la vérité n’est pas l’objectif principal (We think unequal allocations are most obviously OK when truth is not the primary aim)
- Nous pensons que de nombreux défenseurs de l’opinion commune généralisent à partir des pratiques non-relatives à la recherche de la vérité parce qu’ils pensent être la norme davantage que l’exception. (We think many defenders of the common view generalise from non-truth-directed practices because they think they’re the norm rather than the exception.)
Raisons générales de favoriser notre opinion (Broad reasons to favour our view)
- Cela concorde mieux avec l’idée que les bons penseurs devraient toujours fournir des raisons valables appuyant leurs assertions. (It fits better with the idea that good reasoners should always be able to provide reasons for their assertions.)
- Cela concorde mieux avec l’idée qu’un argument vise à établir la vérité : qu’il vise à nous amener à accepter des croyances vraies et à rejeter celle fausses. (It fits better with the idea that argument is ‘truth-seeking’: concerned to lead us to hold true beliefs and reject false beliefs.)
- Cela fournit une réponse à la crainte que ne rien faire et laisser l'opposant faire tout le travaille s'apparente à un appel à l'ignorance : dans notre position, dans les cas où la vérité est recherché, il n'est quasiment jamais question de se reposer sur l'incapacité de l'opposant à montrer la véracité de sa position. (It provides a response to the worry that sitting back and leaving your opponent to do all the work is an appeal to ignorance: in our view, in truth directed inquiries, you are almost never entitled to rely upon your opponent’s inability to show that their view is true.)
pratiques non dirigées vers la recherche de la vérité (Non-Truth-Directed Practices)
Un cas simple : débats formels
Dans les débat formels (le ‘jeu’ consistant à ce que deux parties se voient donner un sujet, et suivent un ensemble de règles afin de voir qui gagne) chaque équipe à la charge de montrer les erreurs factuelles ou logiques du cas de l’équipe adverse. Àmoins que la charge ne soit atteinte, l’affirmation des opposants tient.
(In formal debates (the ‘game’ in which two sides are given a topic, and follow a set of rules to see which side wins) each team has the burden of showing errors of fact or logic in the opposing team’s case. Unless the burden is met, their opponents’ claims stand.)
La réfutation est vitale. Un argument, même faible, tiens tant qu’il est réfuté. Les arbitres ne peuvent pas voir un argument comme à terre tant que l’opposition ne l’a pas effectivement réfuté. Si une équipe fait une erreur factuelle ou logique, l’arbitre ne peut les pénaliser que si l’équipe adverse démontre l’erreur… (Auckland Debating Association Guidelines 2002).
Question : Pourquoi les erreurs logiques ou factuelles non réfutées ne permettent pas de considérer un argument comme nul dans un débat formel ? (Why don’t unrebutted errors of fact or logic undercut an argument in a formal debate?)
Réponse : Car l’on est pas intéressé par la vérité dans un débat formel. On veut de la réthorique, du divertissement, et voir des équipes se rendre compte des failles et forces de l’argument tel que présenté et y répondre (et non voir nécéssairement le meilleur argument qui puisse être présenté). (Because we’re not interested in truth in formal debate. We want rhetoric, entertainment, and to see teams noticing and responding to the flaws and strengths of the argument actually presented (as opposed to the best argument that could be presented).)
Un cas plus délicat: La loi comme pratique non-dirigée vers la vérité
Souvenons-nous de la présomption d’innocence : les accusés ne sont pas tenus de fournir la moindre preuve. Ils sont présumés innocents tant que l’accusation n’a pas prouvé le contraire (met the burden of proving otherwise).
Un exemple : Excluded Evidence: Police v Fowlie. Chris Fowlie était président de l’organisation nationale sur la réforme des lois sur la Marijuana en nouvelle zélande. Il fut mis en examen après que la police eut trouvé de la marijuana dans sa poche. (il est illégal de posséder de la marijuana en nouvelle zélande).
La court détermina que la fouille était illégale :
Je conclus que même si la preuve étaient suffisantes pour prouver au-delà du doute raisonnable toutes les formalités requises.. que la fouille effectuée sur MR fowlie était unreasonnable et que les preuves obtenues ainsi doivent être considérées comme non admissibles. La charge est abandonnée.
Pourquoi exclure une preuve qui semble tout à fait pertinente concernant la culpabilité de Fowlie ? La réponse (à notre avis) : Les procédures légales s’intéressent non seulement à la recherche de la vérité sur ce qui s’est passé, mais aussi de la protection des droits importants concernant la liberté, aux fouilles inacceptables, etc. On fait à ce point attention à nos droits que l’on est prêt à faire le sacrifice de la recherche de la vérité afin de les protéger. Donc, bien que la loi ne soit pas un jeu comme les débats formels, elle n’est elle aussi pas concernée uniquement par la vérité.
autres cas non-dirigés vers larecherche de la vérité
Cas relatifs à la sécurité : On met la charge là où cela est de nature à assurer que les personnes soient en sécurité, même su cela rend plus difficile de savoir si l’activié est réellement sûre. (Safety Cases: We put the burden wherever it is most likely to ensure that people are kept safe, even if it makes it harder to find out whether the activity really is safe.)
pratiques dirigées vers la recherche de la vérité
Dans les pratiques dirigées vers la recherche de la vérité, nous affirmons que la répartition non-égal de la charge de la preuve est presque toujours illégitime. En science, par exemple, nous disons qu’un bon scientifique :
devrait toujours être ouvert à la possibilité d’une preuve qui entre en conflit avec son opinion et devrait être préparer à répondre à des preuves apparemment conflictuelles en enquêtant afin de déterminer si ces preuves tiennent le choc d’un examen et de changer leur opinion si cela est le cas. Donner à une théorie scientifique le statut de position par défaut - la supposant vraie tant que les preuves d’une théorie concurrente ne la surpasse - semble être un moyen de quitter cet idéal. L’opinion par défaut n’est pas tenue aux même standards que l’opinion qui s’y oppose (p.510)
“… should be open to the possibility of evidence that conflicts with her view and should be prepared to respond to apparent conflicting evidence by investigating whether the evidence holds up under scrutiny and modifying the view if it does. Giving a scientific theory the status of a default position - assuming it to be true till the evidence for some competing view becomes overwhelming - seems to be one way of departing from this ideal. The default view is not held to the same standards of evidence as views that oppose it” (p.510).
Un (mauvais exemple en science : H. Pylori. ) ; au début des années 80, il était admis que les ulcères à l’estomac étaient causés par un excès d’acide g&astrique. EN 1983, Barry Marshall et Robin Arren commenère à rapporter des recherches liant les gastrites et ulcères à une bactérie spécifique, l’Helicobacter Pylori. Leur travail fut sommairement rejeté. En 1988, il firent un essai en double aveugle prospectif, comparant un régime d’antibotique avec la thérapie standard démontra clairement le role de la H. Pylori. Toutefois, ce n’est pas avant 1994 que le National Institute of Health publia un consensus acceptant que les antibiotiques actifs contre la H. Pylori soient la thérapie par défaut.
Mais pourquoi est-ce un exemple de science défectueuse ? (bad science)
“Le consensus”pas d’acide, pas d’ulcère“ était traité comme la position par défaut, a abandonner à contre-coeur, er seulement devant des preuves qui ne pouvaient plus être ignorées(overwhelming evidence). Nous suggérons que l’erreur était essentiellement dans la répartition de la charge de la preuve, placer plus que de raison sur la théorie bactérienne” (p.511)
Un problème avec notre opinion ?
Et concernant les consensus légitimes ? Les scientifiques répondent-ils à toutes les mises au défi de l’orthodoxisme scientifique ? Si non, pourquoi ? Nous suggérons que les scientifiques n’ont pas à soumettre ce qu’ils font à chaque fois qu’ils sont mis au défi (par exemple, les affirmations comme quoi les noyaux d’abricots soignent du cancer), parce que “l’opinion faisant consensus” (consensus view) à déjà ses preuves.
quelques vraies exceptions
Parfois, une répartition différente de la charge de le preuve peut nous permettre de trouver la vérité :
- Le cas de l’avertissement au consommateur (the caveat emptor (Let the buyer beware)) : Les vendeur a peut-être une meilleure connaissance, mais il peut aussi avoir des motifs de cacher la vérité. L’acheteur peut avoir des difficultés à trouver la vérité, mais il a de meilleurs raisons pour cela. (The Caveat Emptor (Let the Buyer Beware) Case: Sellers may have better knowledge, but they may also have motive to hide the truth. Buyers may have to go through more trouble to find out the truth, but they have the best motive for doing so.)
- La charge de la preuve inversée dans le cas de l’impôt sur le revenu :
Dans de nombreux pays, les personnes taxées ont la charge de la preuve concernant ce qu’elles affirment à propos de leurs revenus imposables. Pourquoi ?
“La raison clé de la charge de la preuve incombant au contribuable est que les éléments factuels de leur position sont principalement de leur connaissance. De plus, c’est (non traduit).” (NZ IRD 2001)
“The key reason for the onus of proof being on taxpayers is that facts about the tax positions they take are primarily within their knowledge. Moreover, it is the taxpayer who exercises primary control over record-keeping, and over the extent to which there is full and honest disclosure to Inland Revenue.” (NZ IRD 2001)
transcript
Il existe un autre aspect du raisonnement juridique qui semble mal s’accomoder de notre compréhension de ce qu’est qu’être un bon penseur logique et critique : l’attitude de la loi concernant la charge de la preuve.
Nous parlons de la charge de la preuve en des termes plus génériques dans un article de Justime Kingsbury et moi-même qui est parmi les supports de cette semaine, avec un résumé utile. Regardons au-delà de la loi pour le moment. Qu’est-ce que cela signifie que d’avoir la charge de la preuve ?
Voici une explication standard : avoir la charge de la preuve est d’être rationnellement en position de devoir fournir des preuves justifiant vos affirmations. Avoir une charge de la preuve plus lourde que l’opposant est être rationnellement dans une position qui justifie de devoir produire davantage de preuves, ou des preuves de meilleure qualité que ce qui est le cas pour votre adversaire.
Dans cette explication, la répartition de la charge de la preuve - qui l’a et quelle poids a-t-elle - a des implications concernant ce que nous devons faire en tant que penseurs logiques et critiques. Si nous l’avons, nous devons en faire plus, fournir davantage de raisons, ou des raisons plus solides. Si nous ne l’avons pas, il semblerait que nous puissions nous permettre d’en faire moins. Peut-être pourrions-nous même nous asseoir et attendre gentiment que la partie adverse fournisse tout le travail.
Mais cela ne va-t-il pas à l’encontre de notre idée centrale, qu’un bon penseur logique et critique considère toujours les raisons de ses croyances, et prend toujours la responsabilité d’évaluer les raisons de ses croyances ? Et s’asseoir et attendre signifie que je me permet de de prendre mon opinion pour vraie tant qu’on ne me la prouve pas comme étant fausse. Eh bien, cela ne ressemble-t-il pas a un appel à l’ignorance ? N’avons-nous pas dit que cela était fallacieux ?
Alors pourquoi l’idée que la charge de la preuve puisse être répartie de manière non-équitable a-t-elle pu prendre racine en pensée critique et logique ?
Souvenons-nous de l’opinion standard. Pensez un instant àoù vous avez observé la répartition de la charge de la preuve la plus claire et la plus inégal : le contexte juridique. La présomption d’innocence place la charge de la preuve du côté de l’accusateur. Et dans un procès criminel, la charge est lourde. L’état doit prouver au-delà du doute raisonnable que la personne accusée est coupable. L’accusé n’a rien a prouver. Ils peuvent s’asseoir et laisser l’état essayer de prouver leur culpabilité. Si l’accusateur ne peut pas atteindre la charge montrant que la personne accusée est coupable au-delà du doute raisonnable, l’accusé doit être acquitté. La répartition non-équitable de la charge de la preuve est très familière.
Et nous pensons que cela a amené des personnes à traiter cela comme la norme, supposant que le même type de répartition s’applique en dehors du contexte juridique. Mais nous pensons que c’est une erreur. Nous pensons que l’allocation de la charge de la preuve dans le contexte juridique est particulière. Et que cela viens du fait que - cela peut paraître surprenant - que la justice ne s’intéresse pas prioritairement à l’établissement de la vérité. Le juridique, d’après nous, n’est pas premièrement dirigée vers l’établissement de la vérité.Cela peut paraître étrange, mais peut-être moins si l’on dit que le contexte juridique s’intéresse à des choses plus importantes que la vérité. De manière plus évidente, la protection des droits civiques basiques et des libertés qui peuvent être enlevées si une personne est déclarée coupable d’un crime.
Étant donné que l’on voit ces libertés et droits comme importants, on place une lourde charge de la preuve à ceux qui cherchent à les supprimer ou limiter.
As the legal saw has it, mieux vaut 100 coupables libres qu’un innocent condamné. C’est cela que nous disons quand nous disons que la loi n’est pas uniquement ou premièrement intéressée par la recherche de la vérité. C’est pour cela que la justice exclus parfois des preuves obtenus illégalement, même en leur reconnaissant une haute valeur probante qui pourrait avoir résolu la question de la culpabilité ou de l’innocence. Elle s’intéresse moins à la vérité dans de tels cas qu’à l’importance des droits qui sont protégés en décourageant des fouilles et saisies illégales.
Nous ne critiquons pas ici la répartition de la charge de la preuve en justice. Les droits fondamentaux sont importants. Parfois, ils peuvent importer bien davantage que de savoir qui a fait quoi, ou d’être un bon penseur logique et critique comme nous l’avons discuté. (about who did what then about being good, logical, and critical thinkers in the sense we’ve discussed) Mais cela signifie que nous devons êre précautionneux avec l’usage de la justice comme modèle pour la répartition de la charge de la preuve en général. Et pour ajouter un peu de poids à ces considérations, notez que nous avons tendance à penser que les gens agissent mal s’ils traitent la charge de la preuve de manière inégale dans les domaines dirigés vers la recherche de la vérité comme la science.
Les bons scientifiques identifient ce qui met en question leur position et pensent à des tests qui leur permettrons de voir si leur hypothèse est erronée. Les scientifiques qui ne font pas cela agissent mal. Nous discutons de la charge de la preuve en science avec plus de détails dans notre article. En général, toutefois, nous pensons que lorsque nous essayons d’être de bon penseurs logiques et critiques dans des contextes normaux orientés vers la recherche de la vérité, lorsque nous essayons de nous assurer que nous avons de bonnes raisons de croire quelque chose, la charge de la preuve devrait être répartie de manière égale, de manière à ce que chacun prenne une responsabilité égale à évaluer la solidité de sur quoi il base ses croyances.